mercredi 8 avril 2009

Journal de tournée : Cully et paris

30 Mars 09

Nous vivons une époque formidable. L'écran gouverne le monde et chacun peux s'exprimer à travers le net: Facebook, blogs etc.
Autant d'éléments qui permettent d'afficher son quotidien, sa rareté, sa banalité ou de se présenter, d'avoir l'illusion d'exister .
 
L'égocentrisme, la peur du vide sont au cœur du 3ème millénaire. Je suis bien sûr un de ces acteurs et je me demande quel est le sens profond de tout ceci. Il peut y avoir certes un sens poétique, un sens dramatique. De fait le trop tue le peu...

Mon égocentrisme éhonté me permet d'oublier le peu d'intérêt d'une de mes pages d'écriture. On ne s'improvise pas Flaubert ou Carver.

Ces derniers jours furent chargés d'émotion. Benoit Corboz a joué dans L'Indien project à Fontenay-sous-Bois et à Bern. Son jeu rythmique et mélodique nous a littéralement envoûté...
 
Je n'aurais de cesse de le répéter, Benoit Corboz est un musicien talentueux, sous exploité, un ingénieur du son incroyable, un ami rare.

Le trio MST a pris son envol au Next Step 18 ans révolus de Cully, sur les rives du Léman. Ce festival est programmé par une amie de longue date, Karine Zuber et l'ambiance est bonne.
 
Je suis très tendu le soir du concert. Nous allons jouer le programme Mexico pour la première fois sur scène.
 
Talvin Singh est un musicien subtil, chaleureux, très présent et tout en sourire, il fait face au mutisme de Murcof coiffé de son bonnet, concentré sur ses 40 pistes à mixer.
 
C'est un grand bonheur de jouer ce répertoire. Le public est sage, attentif. Nous nous envolons de concert.
 
Plus tard je rejoindrai  Sophie Hunger sur scène pour un duo. J'écoute régulièrement Sophie en alternance avec Neil Young ou CSN, ses possibilités sont immenses et je suis chaque fois envoûté et charmé.
 
31 Mars

Je participe a une émission littéraire de la radio Suisse Romande, Michel Boujut est au cœur de l'émission, sa passion pour Goodis et Flaubert ne peut que m'enchanter.
 
Michel lit des passages d'un de ses derniers livres dont le titre me plait beaucoup :  la vie de marie Thérèse qui bifurqua quand sa passion pour le jazz pris une forme excessive. J'improvise alors qu'il lit, malgré le brouhaha ambiant du restaurant ou est installée la radio.Nous arrivons à créer une atmosphère poignante.

La journée sera marquée par le sceau de la littérature puisque Jean Echenoz à qui j'ai écrit ce matin me réponds par un courriel magnifique.
  
Je profite d'une accalmie au Caveau des Vignerons pour rejoindre mes amis Malcolm Braff, Marc Erbetta et Moret. 
Chaque soir ils jouent, de 22h jusqu'au petit matin, dans une ambiance torride qui n'est pas sans me rappeler kusturitsa et la folie qui règne dans les Balkans.
 
Joe Lovano qui a joué ce soir avec Boltro et Battista nous rejoins pour un magnifique instant et c'est à nouveau un grand bonheur de le revoir et de jouer à ses côtés.
  
1er Avril
 
La journée est belle et sereine, tout est lumière, reflets, nuances.
La réalité non poétique de l'émission de TV Tard pour Bar me rappelle vite à l'ordre. Je suis rapidement excédé par le ton de l'émission. Le débat s'articule autour du jazz et une fois de plus,  on confond la forme et le fond. On aiguise les querelles de 
chapelles, le jazz, le rock, la soul sont des musiques de métissage, alors pourquoi s'étaler sur les divergences. Je trouve que le débat n'est pas très élevé et je le fais vite savoir. Je m'insurge, je m'énerve, le microphone est constamment coupé et cela 
m'afflige. Je me retrouve à quelques heures du concert avec Sly et Pipon dans un état d'énervement proche du désespoir.
 
L'excellent public de Cully me redonne de la vitalité. Le concert est bon. Joël Bastard et Cello nous rejoignent après le concert.
On rit, on fume et je manque de me fouler la main en cognant contre le plafond de la loge. L'équilibre, la sagesse, une ligne d'horizon encore lointaine.
 
2 avril
 
Je tourne en rond dans le quartier de Bastille pendant près de 45 mn avant de trouver la salle. En effet mon imprésario s'est trompé dans les indications et mon non sens de l'orientation a encore sévit .
 
J'aime le public Parisien, j'aime Paris et cette dynamique de capitale. Nous donnons un superbe concert avec les indiens et Malcolm Braff .
 
Je retrouve avec Bonheur la personne qui m'a signé il y a 12 ans sur le label Blue Note, Michel Mouster, subtil, élégant et discret.
  
3 avril
 
C'est mon anniversaire, le jour de l'année que je souhaite le moins fêter puisque somme toute il me rappelle que j ai grillé une année de plus et que la mort se cache derrière la ligne d’horizon. 
Ceci dit j'aime la conscience de l'éphémère, elle développe l'acuité et la vacuité.
  
Je suis très touché par l'attention que me portent mes imprésarios et mes amis. Le concert de la Maroquinerie avec the Fly est gai .
 
4 Avril
 
Le train est rapide. Nous quittons le soleil, j'écoute les quatuors de Schubert n°13 et 14, une petite merveille...espace, tension, évidence.
 
6 avril
 
Robert Pen Warren m'a encore enchanté avec son livre L'esclave libre. Je relis sans me lasser L'usage du monde de Nicolas Bouvier. Il a développé un art de l'observation, une précision dans l écriture qui lui permet de transformer un point en horizon, tout en restant très fidèle.
 
Enfin deux très bonnes nouvelles, le nouveau Jon Hassell qui paraitra chez ECM, ( que j'écoute déjà ! ) est excellent et mon ami Joël Bastard, un de mes poètes préférés, va publier son premier roman aux Editions Gallimard .

LES PHOTOS DE L'ENREGISTREMENT